Histoire

L'histoire d'une localité, d'une région, n'est que la conséquence appliquée à un lieu spécifique des grandes contractions et des courants qui agitent le monde. Cependant, sous l'éclairage de la région ces conséquences prennent des aspects fascinants au contact du terroir auxquels ils sont intimement liés.

 

Bex n'échappe pas à la règle, mais l'éclairage de son terroir y donne des résultats oh! combien intéressants! En toute liberté, nous allons déambuler dans les siècles et nous arrêter sur quelques aspects de la vie de nos aïeux.

 

Bien qu'habité, nous dirons plutôt « hanté » depuis les âges les plus reculés puisque l'on a retrouvé des traces des hommes des cavernes au sud du Marais, puis des hommes de l'âge du bronze sur la colline de Chiètres, il semble qu'un habitat régulier fut beaucoup plus tardif. Comme ailleurs, ce fut durant la période romaine que la route menant. de Massongex vers le lac, route qui passait le long de la colline du Montet, doit avoir vu la construction d'une « Villa » ou exploitation agricole permanente. Rien n'a été retrouvé de cette construction et seul un témoignage postérieur, atteste de son existence. Le lecteur doit s'imaginer que durant toute la période dont nous allons parler, la plaine qui à Bex est d’une surface importante, était inexistante, transformée qu'elle était en un vaste marécage, coupé de bras du Rhône qui changeaient de chemins au gré des crues et semée ça et là d'îles ou « Isles » comme rapporté dans le langage de l'époque. Notre « Villa » fut détruite lors des invasions barbares du haut Moyen-Age et ce n'est qu'en l'an 574 que Bex est mentionnée pour la première fois dans l'histoire, à l'occasion d'un combat important qui eut lieu entre les Francs dont dépendait Bex et les Lombards qui avaient envahis le Valais actuel. Il est parlé dans cette chronique de « in Baccis » et « Baccis villa », ce dernier terme faisant allusion à la Villa dont nous venons de parler. Avant de quitter ces temps reculés, notons encore qu'en l'an 563, il y eu un immense éboulement de la montagne, située selon Grégoire de Tours à la Cime de l'Est (Dents-du-Midi). Cet éboulement barra la vallée du Rhône au Bois Noir et ce dernier forme rapidement un lac qui bientôt force les éboulis, puis se déverse sur toute la plaine en aval, dont celle de Bex, rasant tout sur son passage! Les dégâts, très importants, furent signalés jusqu'à Genève!

 

On l'a vu lors des événements de 574, Bex était une région frontière et tout le haut Moyen-Age doit avoir été particulièrement agité. Aussi, est-il dans la logique des choses de l'époque de voir apparaître dès l'an 1150, alors que notre village dépendait du Comte de Savoie, un château sur la colline de Chiètres, qui commandait l'entrée dans la vallée du Bas-Rhône. Bâtit par Girold de Bex, seigneur du lieu, il fut bientôt accompagné de deux autres constructions qui devaient parfaire cet embryon de défense. Une tour enceinte de remparts fut bientôt érigée sur le premier épaulement de la Dent de Morcles, au lieu dit « Ergnault », à l'extrémité des Monts, ce pâturage horizontal et large que l'on aperçoit au-dessus du quartier actuel des Valentines. Cette tour surveillait la sortie de la vallée de l'Avançon et défendait l'accès du village de « Belmont » fiché sur ce même pâturage et aujourd'hui totalement disparu. Il semble d'ailleurs qu'à cette époque Belmont fut plus important que Bex, les habitants ayant recherché la quiétude des hauteurs, les combats ravageant par trop les endroits accessibles. Enfin, chose inhabituelle, nous avions une dernière tour dite de « Seguin » qui se trouvait au « Chépy », soit au-dessus de la réunion des Avançons d'Anzeindaz et de celle de Nant, au fond de la vallée, afin de riposter à des envahisseurs venus du col du Pas de Cheville. Notre région devait avoir une allure plutôt rébarbative, hérissée qu'elle était des diverses tours du château de Bex, ainsi que celles dont nous venons de parler! Des maisons, l'on ne devait guère en apercevoir, nichées qu'elles étaient dans la luxuriante verdure des forêts qui devaient recouvrir la majorité des flancs des montagnes et une bonne partie de la plaine. Cependant, une route importante la traversait, qui menait de France en Italie et connaissait pour l'époque, un trafic important, apportant à la fois ses bienfaits économiques et malheureusement ses méfaits de guerre et rapines. Une région frontière il est vrai, dont l'importance pour le Comte de Savoie était considérable, justifiant les défenses qu'il y avait fait ériger, Bex était donc apanage de ce Comte, avec les régions avoisinantes des deux côtés du Rhône, sous la dénomination de «Chablais » (du latin Caput Lacis, tête du lac). Aussi, théoriquement, Bex faisait-il partie d'une entité bien spécifique qui n'était rattachée à la Savoie que par son suzerain, un particularisme qui mettra des siècles à se modifier.

 

Bex avait déjà une église dont il ne reste rien, mais dont on a pu reconstituer, en partie, l'évolution. Basse, en voûtes romanes, elle était de dimensions modestes. De 1501 à 1511 l'on bâtit le clocher actuel dont les proportions harmonieuses en font l'une des plus belles réalisations de Jean Vaulet-Dunoyer qui parsema la vallée du Rhône de ses constructions de clochers si caractéristiques. Ce n'est qu'en 1529 que notre église rejoignit son clocher ! En effet, ce dernier avait été érigé à 9 mètres en avant de la nef, afin d'en permettre l’agrandissement futur. Hélas, cette dernière fut incendiée en 1813. La vie religieuse était fort intense et le bâtiment de l'église recevait en sus de sa destination naturelle, à l'issue de la messe (abolie en 1528), puis du culte, le rassemblement des « communiers » c'est-à-dire les bourgeois de Bex, venant y délibérer des affaires de leur communauté. Il s'agit là des débuts de notre actuel Conseil communal.

 

Il ne faut pas croire que nos Bellerines et Bellerins étaient des gens par trop sérieux. De nombreuses fêtes parsemaient l'année et donnaient lieu à des rassemblements des populations venues des Dizains (hameaux) tant de la plaine que de la montagne, sans oublier les gens du lieu. La belle aquarelle de Brandoin dessinée vers 1750, nous montre un rassemblement un jour de foire, avec des gens vêtus de costumes forts divers, sans oublier les enfants qui s'en donnent à coeur joie en jouant à saute mouton! Spectacle pittoresque s'il en est, issu du plaisir de se retrouver après de longues journées à trimer sur son lopin de terre ou dans son arrière-boutique le plus souvent obscure.

 

Mais revenons à l'Histoire, la grande, afin de parler de deux tournants que Bex prit, une première fois avec avance et la seconde avec retard ! En effet, c'est avec avance par rapport au reste du canton de Vaud que Bex fit partie intégrante de la République de Berne. Tout cela débuta par une expédition punitive, dirions-nous aujourd'hui, de Berne sur notre village, en 1464. Une bande de soldats bernois dévalèrent de la montagne et s'en vinrent, à l'heure de la messe, faisant grand tapage, mettre à sac la propriété de noble Rodolphe Asperlin qui était absent, puis s’en retournèrent avec leur butin. Douze ans plus tard c'est la République de Berne qui s’empare de tout le Chablais vaudois (Bex y compris) et se l'approprie sous le nom de Gouvernement d'Aigle. Dès lors la vie des Bellerins devenus citoyens bernois (les premiers suisses de langue française), suivit le cours de la politique de la grande République. L'on doit reconnaître que Berne réforma tant la religion que la vie de ses citoyens, améliorant notamment la culture et développant l'extraction du sel pour le plus grand bien de l'économie de notre communauté. En effet, dès cette époque l'on voit apparaître des constructions dite « bernoises » qui dénotent un mieux-être évident par rapport aux temps précédents. De plus, le Rhône fut endigué, améliorant ainsi la surface des cultures et réduisant le paludisme, fléau endémique de nos marais.

 

Relevons que c'est de 1747 que date la construction de notre Hôtel de Ville, bâti sur les anciennes halles du marché, construction qui fut le sujet de violents affrontements, verbaux tout au moins, entre les Bellerins tenants et opposés à la construction! Quelques siècles plus tard, en 1798 plus précisément, c'est avec retard que Bex s'associa à la révolution vaudoise. C'est seulement le 26 janvier que la commune envoie ses délégués à l'Assemblée provisoire de la République lémanique à Lausanne.

 
Par ce ralliement, bien réfléchi, Bex et de manière générale le Gouvernement d'Aigle, font partie pour la première fois d'un état centré sur Lausanne (le canton de Vaud naissant) car, comme nous l'avons vu, jusqu'alors notre commune faisait partie du Chablais, puis de Berne. Nous sommes ainsi parmi les dernières composantes de notre canton actuel !
 

Le XIXe siècle vit l'éclosion du tourisme à Bex, ainsi que son expansion qui dura jusqu'en 1914 pour venir mourir à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Haut lieu du tourisme, Bex le fut vraiment! De nombreux hôtels virent le jour et les étrangers du monde entier se donnaient rendez-vous dans notre localité, afin d'y goûter son air et ses eaux.

 

L'arrivée du tourisme permit un grand bond en avant sur le plan économique et l'on peut dire qu'il n'y eut pas de familles dont au moins un de leurs membres ne gagna sa vie dans l'hôtellerie! La reconversion fut très difficile et ne put se faire que grâce aux industries qui dès le but du siècle vinrent s'établir en nos murs. Relevons que la chance de Bex résidait (dans l'optique de l'époque) dans son sous-sol par l'extraction de son sel, de son « gypse » ou plâtre et surtout de son eau qui put faire tourner les usines électriques.

 

Bex, industrieuse, poursuit son chemin et ces dernières années voient de nouvelles activités se développer, sans négliger pour autant ses richesses de base qui lui ont été données par la nature, ses cultures et ses vignes, le renom de ces dernières allant sans cesse grandissant.

F. Gillard

BEX EN BREF ...

Des berges du Rhône au sommet des Diablerets (3210 m), le territoire de la commune de Bex, troisième en importance dans le canton de Vaud, se caractérise par une variété de paysages et une palette de couleurs toutes plus éblouissantes les unes que les autres.